4ÈME PORTIQUE : CHAPITRE 24
L'absence d'étude de la Torah retranche l'homme du monde futur.
(Pr. Gross : Le retranchement)
'Hazal ont eu des débats passionnés sur la gravité de la sanction encourue par la personne qui a la possibilité d'étudier la Torah et ne le fait pas, ou celle qui a effectivement étudié mais a cessé de le faire, חס ושׁלום, au point d'affirmer finalement que de telles personnes sont totalement exclues du Monde à venir, que D.ieu vienne à notre secours !
'Hazal expliquent [au sujet du verset :] כִּי דְבַר-יְהוָה בָּזָה, וְאֶת-מִצְוָתוֹ הֵפַר; הִכָּרֵת תִּכָּרֵת הַנֶּפֶשׁ הַהִוא, עֲוֹנָה בָהּ [Bamidbar 15,31 - il s'agit ici du mégadef, du blasphémateur, celui qui a outragé, d'après Rashi] « Il a méprisé la parole de Hashem », Rabbi Natan enseigne qu'il s'agit de celui qui n'est pas assidu (mashgia'h) dans son étude ; Rabbi Néhoraï dit qu'il s'agit de celui qui a la possibilité d'étudier la Torah et ne le fait pas.
Le verset comporte une double expression [de retranchement] à la fin ; הִכָּרֵת תִּכָּרֵת הַנֶּפֶשׁ הַהִוא (retranchée, sera retranchée cette âme - Nefesh), ce qu'on explique ainsi [classiquement dans les enseignements des 'Hakhamim] : retranchée dans ce monde et dans le Monde à venir.
Ce verset met l'accent sur la gravité de la peine de Karet qui, dans ce cas, ne ressemble pas aux autres cas de retranchement mentionnés par la Torah à propos d'autres fautes.
En général, même si un jugement de karet est clairement prononcé,חס ושׁלום, il n'en résulte pas nécessairement une perte [totale] de sa part dans le Monde à venir.
En effet, ne sera effectivement retranchée de sa connexion que la petite étincelle de son âme qui a commis la faute, « la corde brisée » qui était jusqu'à présent reliée et attachée à la Racine de son Âme avec D.ieu, comme on l'a longuement expliqué dans le premier Portique.
Ici cependant, [la Torah] utilise une double expression de retranchement, ce qui signifie que la totalité du niveau de Nefesh a complètement perdu sa part dans la vie éternelle,חס ושׁלום, et n'a aucune part au Monde futur !
[L'interprétation de ce verset comme se rapportant à la négligence dans l'étude de la Torah] est rapportée comme une halakha, par le Rambam (Hilkhot Talmud Torah 3,13) et par le Beth Yossef (dans le Shulkhan Aroukh, Yoré Déah, Hilkhot Talmud Torah 246,25).
De même, Rabbénou Yona décrit dix niveaux de gravité de la faute, dont le plus grave est celui pour lequel 'Hazal enseignent [que celui qui s'en rend coupable] perd sa part du Monde à venir. Dans cette liste figurent ceux qui pourraient se consacrer à l'étude de la Torah et ne le font pas.
Dans le même ordre d'idées, Rabbi 'Haïm Vital décrit aussi cette faute comme susceptible d'exclure l'homme du Monde futur, « tissant dans le même tissu », et établit une équivalence avec le cas de ceux pour qui « le Guéhinom finira, mais pour eux il ne prendra jamais fin », que le Miséricordieux nous vienne en aide.
Le Rambam et le Beit Yossef, sous les mêmes références, [fixent également la Halakha qui concerne] celui qui a étudié, mais a cessé ensuite de le faire, pour s'engager dans les vanités du monde, négligeant l'étude. Celui-là subit le même jugement que celui qui pourrait étudier et ne le fait pas.
De la même manière, dans ce jugement ; « עֲוֹנוֹתֵיכֶם, הִטּוּ-אֵלֶּה; וְחַטֹּאותֵיכֶם, מָנְעוּ הַטּוֹב מִכֶּם - Ce sont vos fautes qui ont dérangé le cours de ces lois, vos péchés qui vous ont privés de ces bienfaits. » (Yirmeyahou 5,25).
Il avait la possibilité de s'adonner à l'étude, et « par l'infatuation de son cœur » et « le mépris de son âme » (deux expressions tirées de Yirmeyahou 49,16 et Ye'hezqel 36,5), il a choisi et « pris une mauvaise acquisition pour lui-même » (expression tirée de Sotah 10b) pour les autres, et pour tous les mondes.
Méprisant la vie éternelle de la Sainte Torah - qui est la vie et la lumière des mondes - par laquelle il était attaché, si l'on peut s'exprimer ainsi, à D.ieu Lui-même qui donne vie à toute créature.
[Au contraire] il a étendu la main pour détruire le Palais du Roi, [provoquant] la diminution, l'obscurcissement et l'extinction de l'épanchement de lumière [divine] sur les mondes et sur son âme elle-même.
[Dès lors], pourquoi jouirait-il de la vie authentique, puisqu'aussi bien il s'est interdit à lui-même de voir la lumière de la vie éternelle. Il ne pourra pas supporter la puissante intensité de la Lumière supérieure, parce qu'il en a pas fait l'expérience lorsqu'il était dans ce monde.
[Tout se passe comme si la Lumière supérieure, le Bien suprême dont le Créateur veut nous faire bénéficier grâce à nos actions au cours de la vie terrestre, demandait une sorte d'entraînement, sans quoi l'intensité de cette Lumière serait impossible à supporter. Cet entraînement, enseigne le Nefesh ha'Haïm, c'est l'étude de la Torah !]
Il est donc exilé, et automatiquement retranché de l'Eden, le jardin de D.ieu. Il s'est interdit de se relier au « faisceau de la vie avec Hashem son D.ieu » (I Shmuel 25,29) « allant de mal en pis » (Yirmeiahou 9,2), D.ieu nous en préserve.
Malheur à une telle honte !
De la même manière, 'Hazal ont déterminé son sort, « son espoir est perdu » (Ye'hezqel 37,11) à jamais, D.ieu nous en préserve, et « jamais il ne verra la lumière » (Téhillim 49,20). Il ne « vivra [pas] de nouveau éternellement » (Téhillim 49,10) à la fin des jours lorsque « [Beaucoup de] ceux qui dorment dans la poussière du sol se réveilleront, les uns pour une vie éternelle, [les autres pour être un objet d'ignominie et d'horreur éternelle]. »
Ainsi que l'enseignent nos Sages de mémoire bénie, [commentant le verset] : « [Puissent donc tes morts revenir à la vie et les cadavres des miens ressusciter ! Réveillez-vous et entonnez des cantiques, vous qui dormez dans la poussière !] Oui, pareille à la rosée du matin est ta rosée : [grâce à elle, la terre laisse échapper ses ombres]. » (Yishayahou 26,19). Tout celui qui se consacre à la lumière de la Torah, la Torah le fait revivre, mais celui qui ne se consacre pas à la lumière de la Torah, la Torah ne le fait pas revivre.
La seule voie que 'Hazal ont trouvée pour permettre à ceux qui sont illettrés en matière de Torah, c'est qu'au moins ils soutiennent et renforcent l'Arbre de vie, en faisant profiter les Talmidéi 'Hakhamim de leurs biens matériels.
C'est ainsi que poursuit le Talmud (Ketouvot 111b) : Mon Maître ! J'ai trouvé un moyen pour eux dans la Torah : « וְאַתֶּם, הַדְּבֵקִים, בַּיהוָה, אֱלֹהֵיכֶם--חַיִּים כֻּלְּכֶם, הַיּוֹם - Et vous qui êtes restés fidèles à Hashem, votre D.ieu, vous êtes tous vivants aujourd'hui ! " (Devarim 4.4). Est-il possible de "rester fidèle" à la Shekhina (à la Présence divine) ? Cela veut dire que celui qui marie sa fille à un Talmid 'Hakham, et qui commerce avec un Talmid 'Hakham, ou permet à un Talmid 'Hakham de bénéficier de ses biens est considéré comme étant "resté fidèle" à la Shékhina. [Notez que le terme דְּבֵקִים, qu'on a traduit par "restés fidèles", vient de la racine דבק, qui signifie attachement.]
הָקִיצוּ וְרַנְּנוּ שֹׁכְנֵי עָפָר - Réveillez-vous et entonnez des cantiques, vous qui dormez dans la poussière ! (Yeshayahou 26.19). [C'est sur ce verset que] le Roi David a dit : Que ma part soit avec ceux qui se tuent sur les paroles de la Torah ! Réveillez-vous et entonnez des cantiques, vous qui dormez dans la poussière ! - [c'est sur ce verset qu'] ils ont dit : celui qui se fait un "voisin de la poussière" durant sa vie [terrestre], alors, sa "poussière" sera ressuscitée, mais celui que ne se fait pas un voisin de la poussière durant sa vie [terrestre], sa "poussière" ne sera pas ressuscitée [Que D;ieu nous vienne en aide].
Pour ceux qui s'annulent eux-mêmes pour apprendre la Torah, Hashem amène sur eux la "rosée de la lumière" de la Torah... et les emmène au Gan 'Eden comme il est dit [dans la suite du verset] "Oui, pareille à la rosée [qui revit le] matin est ta rosée".
C'est pourquoi 'Hazal parlent d'un Talmid 'Hakham qui se sépare de la Torah comme "une chose tordue qui ne peut être redressée" car, חס ושׁלום , il n'y a pour lui aucun remède. Puisse D.ieu nous sauver de toute chose semblable !
Mis en ligne le 6 Adar 5778 - 21 février 2018