WAYETSÉ 5777
Traquer le mal à la racine
Leylou nishmat James B. ben Fanny
ּ וַתֵּרֶא רָחֵל, כִּי לֹא יָלְדָה לְיַעֲקֹב, וַתְּקַנֵּא רָחֵל, בַּאֲחֹתָה
Ra'hel vit qu'elle n'enfantait pas à Ya'aqov, Ra'hel fut jalouse de sa sœur (Gen. 30,1)
Rashi : Elle a envié ses bonnes actions. Elle se disait : « Si elle n'était pas plus vertueuse que moi, elle n'aurait pas mérité d'avoir des enfants » (Ber.Rabba 71,6)
Si c'est bien le cas, l'attitude de Ra'hel est difficile à comprendre. Elle aurait du observer le comportement de sa sœur et chercher à l'imiter. Pourquoi avoir recours à la prière de son mari au lieu de chercher à améliorer ses actions, et avoir des enfants grâce à son propre mérite ?
Lorsque nous rencontrons Léah, la Torah nous indique que « ses yeux étaient ternes ».
Rashi à nouveau, d'après le même Midrash : « Parce qu'elle se croyait destinée à 'Essaw, et elle en pleurait. »
C'est le bruit qui court dans le monde : l'aîné de Yits'haq aura l'aînée de Lavane, le cadet aura la cadette.
La réputation de 'Essaw n'est un secret pour personne. Et Léah pleure sa destinée. Elle est inconsolable. Hashem la prend en pitié. Il lui fait don de la fécondité...
Ra'hel, de son côté, mène une vie épanouie. Elle est consciente de sa beauté, et, beaucoup plus important, elle sait qu'elle est promise à Ya'aqov, le Tsaddik.
Elle est joie, et gratitude et de cela même vient son dilemme. Elle comprend que le mérite de Léah est d'avoir rejeté le comportement dévoyé de 'Essaw. Léah pouvait vraiment incarner ce rejet, parce qu'elle pensait devoir être entraînée dans la vie de ce rash'a.
Ra'hel ressent elle aussi du dégoût pour la manière de vivre de 'Essaw, mais elle ne peut pas l'éprouver avec la même intensité que sa sœur. C'est un mérite auquel elle ne peut atteindre, non par absence de volonté, mais parce que les circonstances de sa propre vie ne le lui permettent pas! C'est pourquoi elle demande à Ya'aqov de prier, dans l'espoir que le mérite de son mari suppléera à celui auquel elle n'a pas accès.
On connaît la réponse, étonnamment acerbe, de Ya'aqov : « Suis-je à la place de Éloqim, qui t'a refusé le fruit du ventre ». Rashi : Tu me dis de faire comme mon père [qui a prié pour avoir des enfants]. Je ne suis pas comme mon père ! Mon père n'avait pas d'enfants. Moi j'en ai ! C'est à toi que Hashem a refusé la fécondité, pas à moi !
L'attitude de Ya'aqov donne à Ra'hel matière à réfléchir : si je ne peux lui donner d'enfants, il envisagera peut-être de me répudier. Dans ce cas, qu'arrivera-t-il si 'Essaw pose ses yeux sur moi? Rashi (sur le verset 22) confirme que 'Essaw, « voyant qu'elle n'avait pas d'enfant, désira la prendre pour lui et elle en était accablée. »
C'est ainsi que Ra'hel commença à réagir vis à vis de 'Essaw exactement comme sa sœur Léah l'avait fait ! Et depuis sa nouvelle vulnérabilité, elle put véritablement éprouver le rejet du mal. Alors seulement, Hashem la récompensa par une grossesse.
Comment se fait-il, cependant, que la mise au monde des enfants repose sur la haine de 'Essaw ? Nos matriarches n'étaient-elles pas éminemment vertueuses. N'avaient-elles pas atteint le niveau de la Prophétie ? Leurs mérites positifs n'auraient-ils pas suffi à leur fécondité ?
Les mefarshim ont été troublés par le fait que Yits'haq ait pu engendrer 'Essaw, notamment après l'expérience de la Aqédah, qui avait fait de lui une pure Olah.
Et certains pensent que c'est de Rivka que venait ce potentiel négatif. Il y avait dans ses racines familiales nombre d 'éléments mauvais dont elle n'avait pas pu entièrement se débarrasser. Comme produit du ventre de Rivka (« Deux nations dans ton ventre ») et non de la seule pureté de Yits'haq, 'Essaw avait partie liée avec le mal venant de la lignée de Rivka.
La Providence divine avait d'autres projets pour Ya'aqov. Sa descendance devait se consacrer, dans l'unité, à la transmission des principes et du message de leur père. Il était nécessaire de traiter le mal résiduel encore présent dans la famille. HaKadosh Baroukh Hou a donc « organisé » les conditions dans lesquelles nos Matriarches allaient agir à cet égard : d'abord Léah, puis Ra'hel furent tour à tour placées dans des situations où elles auraient à concevoir une puissante aversion pour 'Essaw et tout ce qu'il représente. C'était la seule voie pour mériter d'avoir des enfants. La seule voie pour devenir les mères des tribus d'Israël.
D'après Rabbi Yits'haq Adlerstein sur le Beer Yossef - Torah.org
Mis en ligne le 7 Kislev 5777 (7 décembre 2016)