2.1

La prière avec concentration (kavanah) doit être exclusivement orientée vers HaShem

Pour la protection de nos soldats et de tout le peuple d'Israël, pour le retour des prisonniers, pour la guérison des blessés et la consolation de toutes les familles endeuillées.

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Il est écrit : « pour aimer HaShem ton Éloqim, et pour Le servir de tout votre cœur et de toute votre âme (1). » et Ḥazal ont dit : « Qu'est-ce que le Service du cœur ? Tu dois dire que c'est la prière. (2) »

Cet amour, dont il est dit qu'il doit être « de tout ton cœur », est évidemment un de ces commandements qui dépendent du cœur.

De la même manière, ce concept d'un amour dont il est dit qu'il doit être « de toute son âme » signifie que l'on doit être prêt à donner sa propre vie pour HaShem (3), du simple fait de la force extraordinaire de l'amour que l'on éprouve pour Lui, béni soit Son Nom. Comme il est écrit dans le premier paragraphe [du Shém'a] « Tu aimeras HaShem, ton Éloqim, de tout ton cœur, de toute ton âme [et de tout ton pouvoir]», alors que dans le [second] paragraphe [du Shém'a apparaît] l'idée nouvelle (le 'Hiddoush) que même le service, c'est-à-dire la prière, doit être effectué de tout son cœur et de toute son âme. C'est pour cela que ce [second] paragraphe, contrairement au premier, n'évoque pas « tout ton pouvoir », puisque le premier paragraphe est centré sur le commandement de l'amour, pour lequel il est pertinent de dire qu'il doit être « de toutes ses forces » c'est-à-dire de toutes tes ressources financières (4). C'est ce qu'on enseigné Ḥazal : « parce qu'il existe des gens pour qui leur argent compte plus que leur propre personne » (Berakhot 61b).

Cependant, ce [second] paragraphe fait également référence au service, c'est-à-dire à la prière, pour laquelle il est moins pertinent d'évoquer « tout son pouvoir. (5) »

L'affirmation « de tout ton cœur », dans son lien avec la prière est simple, et la signification du verset implique deux exigences (6) :

Tout d'abord, [il faut] débarrasser son cœur de de toutes pensées intempestives, et engager entièrement et profondément son cœur dans les mots de la prière, comme l'ont dit nos Sages : « Celui qui prie doit diriger son cœur vers le Ciel. [ Abba Shaoul a dit : le verset donne un signe de l'importance de cet enseignement:] ''(Tu entends le souhait des humbles, Éternel,) dirige leurs cœurs [et Ton oreille entendra.]'' (7) »

C'est aussi ce qu'on apprend des versets qui rapportent la prière de Ḥannah : « Ḥannah parlait en son cœur. (8) » On apprend ici que celui qui prie doit orienter son cœur (9).

Comme l'écrit le roi David : « ''Je Te recherche de tout mon cœur (10)'' Tous ceux qui prient devant le Saint Roi doivent faire leurs demandes et prier du plus profond de leur cœur, de sorte que leur cœur soit trouvé intègre pour HaShem, et qu'ils concentrent leur cœur et leur volonté. (11) »

C'est pourquoi Ḥazal ont enseigné que [si une personne doit répéter sa prière,] elle doit attendre jusqu'à ce qu'elle soit capable de maîtriser ses pensées.

C'est là le sens de « de tout ton cœur » : le cœur ne doit être empli que du sens des mots de la prière. Si d'autres pensées, quelles qu'elles soient surgissent dans son cœur, alors l'intention de son cœur est comme divisée en deux pensées.

En second lieu, [il faut] utiliser le service actif de la prière pour débarrasser radicalement son cœur de tout désir matériel et de tout plaisir, de manière à ne fixer son regard que dans la direction du Ciel et vers la grandeur du Créateur, comme l'ont enseigné nos Sages : « Celui qui prie doit diriger [ses yeux vers le bas et] son cœur vers le Ciel (12) », au point que le potentiel tout entier de son cœur est entièrement dirigé vers le Ciel, et se réjouit en D.ieu seul, par les mots de la prière.

C'est ainsi que les premiers Ḥassidim [se préparaient] pendant une heure [avant la prière] pour concentrer l'attention de leur cœur sur l'Omniprésent [לַמָקוֹם] (13). C'est l'explication donnée par Rabbénou Yona. Voyez [ce commentaire] et soyez-y attentifs (14).

Comme il est dit : « une personne doit purifier son cœur avant la prière. (15) »

Cependant, cet aspect essentiel de la purification du cœur ne fait qu'ajouter une dimension à l'accomplissement de la Mitsva, mais ne l'invalide pas en son absence [c'est-à-dire si la personne l'accomplit avec un cœur impur.] C'est également vrai de la prière, bien qu'elle soit appelée « Service du cœur. » Ce point a été évoqué plus haut, à savoir que l'accomplissement est l'essentiel de toute Mitsva [en dehors de toute intention associée]16.

Mais pour comprendre en quoi l'expression « de toute ton âme » fait référence à la prière, il nous faut d'abord expliquer le sens du concept de « bénir » HaShem, si l'on peut dire.

On en trouve de nombreuses occurrences dans la Torah, comme :

« Tu béniras HaShem ton Éloqim (17) »

« Béni soit HaShem à jamais (18). »

« Bénis, mon âme, HaShem ! (19) »

De même, on trouve [ces formules] dans les paroles de nos Maîtres de mémoire bénie :

« Comme s'Il disait à Rabbi Yishmaël : Yishmaël Mon fils, bénis-Moi (20). »

Ainsi en va-t-il de la formulation de toutes nos prières en bénédictions, telles qu'elles ont été enseignées par les hommes de la Grande Assemblée, qui commencent ou se terminent par le mot « Béni – בָּרוּךְ).


1 Dévarim – Deutéronome 11,13 : « לְאַהֲבָה אֶת-ה׳ אֱלֹקֵיכֶם, וּלְעָבְדוֹ, בְּכָל-לְבַבְכֶם, וּבְכָל-נַפְשְׁכֶם. ». Il s'agit du premier verset du second paragraphe du « Shém'a Israël ». Rashi commente : « Et pour le servir de tout votre cœur : Un service qui est dans le cœur, à savoir la prière. La prière est en effet appelée « service », comme il est écrit : « Ton Éloqim que tu "sers" sans cesse… » (Daniel 6, 17). Or, existe-t-il un « Service » [comparable à celui du Temple] en Babylonie ? C'est donc qu'il priait, comme il est écrit : ''Ses fenêtres étaient ouvertes dans sa chambre vers Jérusalem et il priait trois fois par jour'' (ibid. verset 11). De même est-il écrit pour David : ''Puisse ma prière être déposée comme de l'encens devant Toi'' (Tehilim 141, 2). »

2 Ta'anit 2a, et Sifri Éqev 41. On traduit habituellement le mot « לְב (lèv)» par « cœur », organe lié aux émotions, et siège du désir. Mais il est utilisé par l'Écriture et par nos Sages en relation non seulement avec l'émotion pure, mais aussi avec l'influence significative qu'il a sur la pensée. En langage contemporain, on parlerait de l'intuition, ou même d'une composante de l'esprit.
Plusieurs versets associent le terme à la pensée, comme « les pensées de son cœur » (Téhillim 33,11 et Mishléi 19,21). Rabbi Ḥayim lui-même écrit : « Car comme on le sait, le cœur est le niveau de la pensée. » (2,16) D'autres versets associent le cœur avec la connaissance : « HaShem leur a donné un cœur pour connaître et des yeux pour voir. » (Dévarim 29,3). Le Shoulkhan Aroukh (Hilkhot Téfilines 25,5) enseigne que l'âme se trouve dans le cerveau, et que le cœur est la source principale des désirs et des pensées. Dans son Émet leYa'aqov, Rabbi Ya'aqov Kamenetsky (1891-1986) constate que, par opposition à la Mishna, il n'y a pas de mot pour cerveau dans l'Écriture. Il considère que lorsque la Torah fait usage du mot « לְב(lèv) », elle veut dire cerveau.
Dans notre traduction, le terme « לְב (lèv) » a été rendu par cœur, dans la mesure où Rabbi Ḥayim l'utilise pour désigner le cœur, par opposition avec le terme « מֹחַ (moa) » pour cerveau (v. 1,14 fin du chapitre). Il est cependant très intéressant d'observer l'utilisation du mot « לְב (lèv) » au courant des second et troisième Portiques avec le sens « d'esprit », ce qui fait penser le « Service du cœur » comme étant en réalité le « Service de l'esprit », c'est-à-dire un exercice de méditation intellectuelle, de sorte que l'amour dont il est question dans ce premier chapitre doit être compris comme inspiré par l'intellect.

3 Dévarim – Deutéronome 6,5 où l'injonction est exprimée au singulier : « וְאָהַבְתָּ, אֵת ה׳ אֱלֹקֵיךָ, בְּכָל-לְבָבְךָ וּבְכָל-נַפְשְׁךָ, וּבְכָל-מְאֹדֶךָ ». Rashi commente donc sur Ibid. 11,13 : « De tout votre cœur et de toute votre âme N'a-t-il pas déjà été prescrit : « de tout ton cœur et de toute ton âme » ? Il s'agit là-bas d'une prescription adressée à l'individu, ici d'une prescription adressée à la collectivité. »

4 Comme le précise Rashi : « Et de tout ton pouvoir : De toute ta fortune. Il est écrit : ''et de tout ton pouvoir'' parce qu'il existe des gens pour qui leur argent compte plus que leur propre personne (Berakhot 61b). »

5 V. 1,8, Note 10, qui propose une autre explication.

6 C'est à quoi fait allusion l'utilisation du pluriel « lévavékha » (littéralement : tes cœurs) dans le second paragraphe du Shém'a.

7 Berakhot 31a, qui cite Téhillim 10,17. Rashi explique que si l'on oriente d'abord son cœur en prière vers le Ciel, alors l'oreille de HaShem sera attentive.

8 I Shemouel – I Samuel 1,13 : « וְחַנָּה, הִיא מְדַבֶּרֶת עַל-לִבָּהּ »

9 Berakhot 31a.

10 Téhillim – Psaumes 119,10 : « בְּכָל-לִבִּי דְרַשְׁתִּיךָ »

11 Zohar II Béshalla ḥ 63b.

12 Yévamot 105b : « Rabbi Ḥiya and Rabbi Shim'on bar Rabbi Yéhoudah HaNassi étaient assis à l'extérieur du Beth haMidrash, plongés dans l'étude de la Torah. L'un d'entre eux ouvrit [la discussion] et dit : Celui qui prie doit diriger son regard vers le sol, comme HaShem l'a écrit au sujet du Saint Temple : ''Mes yeux et Mon cœur y seront constamment'' (I Rois 9,3), ce qui signifie : la Shékhina (la Présence divine) repose sur Érets Israël, et l'on doit diriger son regard vers la terre sainte lorsqu'on prie.
L'autre dit : Il doit diriger ses yeux vers le haut, parce qu'il est écrit : ''Élevons nos cœurs avec nos mains vers Qèl qui est au Ciel !'' (Lamentations 3,41). Rabbi Yishmaël, le fils de Rabbi Yossé arriva près d'eux. Il leur demanda : Quel est le sujet [de votre échange] ? Il lui dirent : La prière, car nous sommes en désaccord sur la posture appropriée pour celui qui prie. Il leur dit : Mon père, Rabbi Yossé, disait la chose suivante : Celui qui prie doit diriger ses yeux vers le bas et son cœur vers le haut, pour accomplir [les enseignements de] ces deux versets. »

13 Mishna Berakhot 5,1 : « On ne se met à prier que sous l'impression du respect divin. Les anciens savants pieux attendaient un instant (en entrant à la synagogue) avant de prier, afin de se recueillir et de penser à notre Père qui est aux cieux. Si le roi même les saluait, ils ne répondaient pas; ils ne se seraient pas interrompus, eussent-ils eu un serpent enroulé autour du talon. » (Traduction de Moïse Schwab, 1839-1918)

14 Rabbénou Yona (Rabbi Yonah ben Abraham Gerondi (יוֹנָה בֶּן־אַבְרָהָם גִירוֹנְדִי‎) ?-1264, est l'auteur de l'un des grands textes de morale juive : Les Portes de la Téshouva [שערי תשובה]). Il commente ici le Rif sur Berakhot 30b : « pour concentrer l'attention de leur cœur sur l'Omniprésent [לַמָקוֹם] : cela signifie certainement qu'ils devaient concentrer leur cœur totalement sur le Service divin, et extirper toute pensée de jouissance de ce monde, car lorsqu'ils purifiaient leur cœur de toute vaine pensée et se concentrent sur la grandeur de HaShem, alors leur prière est appropriée et acceptée par Lui. »

15 Shemot Rabba Béshallaḥ 22,3.

16 À la fin de 1,22.

17 Dévarim – Deutéronome 8,10 : « וּבֵרַכְתָּ אֶת-ה׳ אֱלֹקֵיךָ ». C'est de ce verset qu'est tirée la Mitsva de la Torah du Birkate haMazone (bénédiction après le repas.)

18 Téhillim – Psaumes 89,53 : « בָּרוּךְ ה׳ לְעוֹלָם »

19 Ibid. 103,1 : « בָּרְכִי נַפְשִׁי, אֶת-ה׳»

20 Berakhot 7a : Rabbi Yishmaël était le Cohen gadol. Il raconte dans cette Guémara qu'étant entré dans le Saint des Saints le jour de Kippour, il trouva HaShem Tsévaqot (littéralement « D.ieu des armées », Nom qui exprime l'autorité suprême), assis sur Son Trône. HaShem lui dit : « Yishmaël Mon fils, bénis-Moi. Rabbi Yishmaël [qui ne manquait pas de sang-froid] répondit : « Que ce soit Ta Volonté que Ta Miséricorde l'emporte sur Ta colère, et que Ta Miséricorde l'emporte sur Tes [autres] attributs, puisses-Tu agir envers Tes enfants par Ton attribut de Miséricorde, et puisses-Tu entrer [en jugement] devant eux au-delà de la lettre de la Loi. » HaShem approuva cette formule. La Guémara apprend de cet épisode qu'on ne doit pas mépriser la Berakha d'une humble personne, si HaShem Lui-même, dans Sa grandeur infinie, n'a pas méprisé la bénédiction d'un être de chair et de sang.

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