BO 5777
Quand les circonstances le permettront...
Hashem dit à Moshé : « Étends ta main sur le ciel, il y aura ténèbres sur le pays d'Égypte et les ténèbres s'épaissiront » (Shemot 10,21)
Rashi : « Et pourquoi Hashem leur a-t-Il infligé la plaie des ténèbres ? Parce qu'Israël comptait en son sein des impies (רְשָׁעִים) qui ne voulaient pas sortir [d'Égypte] et qui sont morts pendant les trois jours de ténèbres. »
Le Rav Ye'hesqel Levenstein, le Machguia'h de Ponevezh, cité par le Talelei Orot, demande pourquoi Hashem a jugé nécessaire de faire mourir ceux « qui ne voulaient pas sortir » d'un seul coup, ce qui rendait les ténèbres nécessaires. Habituellement, les ateliers de la justice divine fonctionnent plus lentement !
Souvent, répond le Rav Levenstein, un homme se promet d'accomplir de grandes choses, plus tard, « lorsque les circonstances le permettront ». Jusqu'à présent, il justifie son inaction par un contexte défavorable.
Mais ces circonstances finissent par disparaître ! Il n'avait pas le temps, pas l'argent, pas la disponibilité, et le voilà retraité, héritier, libre de contraintes...
Et il ne passe pas à l'action pour autant !
Comment expliquer cela, sinon par l'intervention du penchant au mal ? Jusque-là, il n'avait pas à s'employer trop énergiquement : les conditions extérieures suffisaient à dissuader l'homme d'agir dans le sens du Service divin. Le yetser hara n'a guère besoin d'intervenir sur les projets de l'homme, tant qu'il ne peut pas les réaliser. Il lui suffit de le convaincre qu'il est victime de circonstances adverses.
Il en va autrement lorsque ces circonstances disparaissent. Le penchant au mal doit alors affaiblir la volonté de servir D.ieu.
C'est exactement ce qui s'est passé en Égypte.
Tant que durait la dure servitude, tout le monde pouvait proclamer sa volonté de quitter l'Égypte corrompue et de recevoir la Torah ! Le projet ne pouvait se réaliser, cependant, du fait de l'oppression égyptienne.
Mais lorsque commencent les négociations : מי ומי ההלכים (Qui et qui sont ceux qui partiront ? 10,8) et plus tôt : חטאתי הפעם ׃ הי הצדיק ואני ועמי הרשעים (J'ai péché [dit Pharaon]. Hashem est Le Juste et moi et mon peuple sommes coupables. 9,27), la situation a complètement changé. Les Hébreux ne sont plus soumis au travail forcé, et la libération apparaît à tous comme imminente.
Le choix devient alors bien réel, aux yeux de chacun : voulait-on suivre Moshé, abandonner à jamais ce pays de servitude et de perdition morale, quitter le joug de Pharaon pour devenir des serviteurs de D.ieu ? Ou bien rester en Égypte, et y mener une vie placée sous le signe de la jouissance matérielle sans limites ?
Ceux qui, en leur cœur, avaient déjà fait ce choix, ne pouvaient plus donner le change... Ils durent se montrer sous leur véritable jour.
Voilà pourquoi ils méritèrent de disparaître. C'est ainsi que D.ieu a prolongé la plaie des ténèbres de trois jours, comme l'explique Rashi : « Il ne fallait pas que les Égyptiens pussent assister à leur ruine et dire : 'Eux aussi ont été frappés comme nous !' »
Mis en ligne le 16 Shevat 5777 - 11 février 2017