1.22
22. L'accomplissement matériel de la Mitsva est essentiel L'intention appropriée (Kavanna) en augmente l'impact
Pour la protection de nos soldats et de tout le peuple d'Israël, pour le retour des prisonniers, pour la guérison des blessés et la consolation de toutes les familles endeuillées.
Depuis que Moshé a fait descendre [la Torah] sur terre [dans le monde physique], « elle n'est pas dans le Ciel. (1) »
C'est pourquoi aucune personne ne possède un niveau de perception si grand qu'elle puisse dire : « j'ai accès au secret des raisons profondes des Mitsvot [et de leurs effets] sur les forces et les mondes supérieurs, si bien que conformément à la racine de ma Néshama, il m'est permis, ou il est permis à telle personne de transgresser une certaine Mitsva, ḥas veShalom, ou de négliger tel détail de l'observance concrète [de la Mitsva pour en venir à] un accomplissement dégradé, même lorsqu'il s'agit d'un des petits détails enseignés par les Sages, ou de modifier l'heure (2) de l'accomplissement, D. nous en préserve. »
La Torah conclut à cet égard : « Il ne se lèvera pas en Israël un prophète comparable à Moshé (3) », ainsi que Ḥazal interprètent le verset : « Tels sont les commandements [que HaShem donna à Moshé pour les enfants d'Israël, au mont Sinaï.] (4) » Cela veut dire qu'aucun prophète [ultérieur] n'a autorité pour instituer quoi que ce soit de nouveau, comme il est écrit : « Toute la chose que Je vous ordonne, [celle-là vous prendrez garde de faire,] tu n'ajouteras pas sur elle, et tu ne diminueras pas d'elle.(5) » même « lorsque se lèvera au milieu de toi un prophète » qui a l'intention d'ajouter ou de soustraire [à la Torah] has veShalom, « tu n'écouteras pas les paroles de ce prophète-là […] mais derrière HaShem votre Éloqim vous marcherez... (6)»
C'est ainsi que le Roi Ḥizqiyahou qui [ne voulut pas d'abord] se marier, car il avait vu par inspiration divine qu'il était destiné à avoir des descendants impies (7). Ses intentions étaient dans l'intérêt du Ciel (לְשֵׁם שָׁמַיִם), car il ne voulait pas multiplier le nombre des impies dans le monde. Mais le prophète Yéshayahou (Isaïe) lui transmit la remontrance de HaShem et lui dit : « Ainsi parle HaShem : Donne tes ordres à ta maison, car tu vas mourir » et « tu ne vivras pas. (8) » dans le Monde à venir, parce que tu ne t'es pas préoccupé d'accomplir la Mitsva de « croître et multiplier ». L'immense et merveilleuse droiture [du roi Ḥizqiyahou] ne lui eut été d'aucun secours pour entrer dans le Monde à venir, puisqu'il avait cru bon de négliger une seule des Mitsvot de la Torah de Moshé. Bien qu'il ait eu la vision, par inspiration divine, d'hommes impies dans sa descendance, et bien qu'il n'y eut [dans son cas aucune transgression active,] mais seulement une abstention passive.
C'est que les raisons profondes des Mitsvot n'ont été révélées à âme qui vive, pas même à Moshé Rabbénou. Elles ne furent révélées qu'à Adam haRishone avant la faute. [Ces raisons étaient ce que nos Maîtres ont appelé] « le vin qui n'a pas été exprimé de la vigne depuis les six jours de la Création (9) » et « la lumière [primordiale] qui permettait à Adam de voir d'une extrémité du monde à l'autre. (10) »
La Torah est à un niveau d'abstraction tel qu'aucun intellect ne peut la saisir, au dessus de toute perception, et dès lors, comment pourrait-on user de son propre raisonnement pour changer le moindre détail des règles [des Mitsvot] où le temps exigé [pour leur accomplissement], au nom de ses profondes connaissances et perceptions.
C'est ce que Yéshayahou répondit au roi Hizqiyahou : « Pourquoi [entends-tu te mêler] des secrets de HaQadosh Baroukh Hou. Ce qui t'a été ordonné [à savoir la Mitsva de procréation], tu dois l'accomplir, et ce qui est bon à Ses yeux, Il le fera, selon Sa décision ! (11) »
Tant que la prophétie existait en Israël, un prophète avait autorité pour introduire des modifications dans les Mitsvot, mais uniquement de manière temporaire, pour répondre à une nécessité de l'heure. Ce mandat s'étendait jusqu'à permettre la transgression de l'un des commandements de HaShem, comme l'a fait le Prophète Éliyahou, lorsqu'il offrit un sacrifice sur le mont Carmel (12), et d'autres exemples semblables.
Néanmoins, cette [autorité] s'exerce dans le cadre de ce qu'ordonne la Torah de Moshé : « Lui vous [l]'écouterez ». C'est une injonction et une mise en garde d'écouter les paroles du prophète, même si sa prophétie, proférée au nom de HaShem, exige la transgression d'une Mitsva particulière en un temps qui la rend nécessaire, exception faite de l'idolâtrie.
Mais il ne s'agit pas, ḥas veShalom, de [l'autorisation] d'entreprendre des changements permanents, comme [on l'apprend] d'Ester. Bien qu'elle fût une des sept prophétesses, lorsqu'elle demanda aux Sages de « l'inscrire pour les générations », ils répondirent par le verset : « Ne t'ai-je pas inscrite trois fois ? (13) » Mais [sa requête lui fut accordée] par Ḥazal, qui parvinrent plus tard à relier [Ester et par conséquent sa demande] à un appui textuel dans la Torah (14).
C'est également le cas de [la Mitsva rabbinique] des lumières de Ḥanoukah. Il est certain que les Sages ont également trouvé un appui scripturaire (15).
À partir du moment où, du fait de nos fautes, la prophétie disparut du sein d'Israël, et même si s'assemblaient tous les Sages d'Israël, à qui [la connaissance cachée] de l'œuvre de la Création et la structure du Char céleste furent révélées, et dont la perception et le pur intellect permettent d'explorer profondément [et d'identifier la nécessité] de changer même un petit détail dans une Mitsva spécifiée, ou bien d'en avancer ou reculer le temps de son observance, D. nous en préserve, il ne nous est pas permis de les écouter, quand bien même une voix céleste se fait entendre comme l'ont proclamé Ḥazal : « [La Torah] n'est pas [tranchée] dans les Cieux ! (16) »
Néanmoins, les Sages du Talmud avaient tout de même une autorité suffisante pour instituer des commandements rabbiniques, dans la mesure où ils pouvaient trouver un appui dans la Torah, comme dans le cas des lumières de Ḥanoukah, comme on l'a expliqué. Ils pouvaient également promulguer des décrets rabbiniques, comme « les dix-huit décrets [pris dans le grenier de Ḥananiah ben Ḥizqiya ben Garon] (17) » et d'autres exemples semblables.
Mais lorsque [la rédaction] du Saint Talmud fut achevée, il ne nous reste qu'à garder et observer toutes les instructions de la Sainte Torah, écrite et orale, toutes ses lois, ses statuts, ses temps [fixés], ses détails, sa ponctuation sans aucune déviation d'aucune sorte.
Et lorsqu'un Juif les accomplit, même s'il agit sans l'intention appropriée, et bien qu'il n'ait aucune conscience des raisons des Mitsvot, ni des motifs secrets qui les animent, les Mitsvot ont été accomplies d'une manière valable. Elles opéreront rectification et accroissement de la Sainteté et de la lumière dans tous les mondes, chaque Mitsva étant réalisée en temps voulu, selon sa source et son rite, donnant ainsi une force à Éloqim Yitbarakh Shémo.
C'est ainsi que le Créateur a établi la nature des mondes, qui opèrent en fonction des actions des hommes. L'accomplissement de chaque Mitsva monte automatiquement pour produire l'impact particulier qui lui est propre.
Ceux à qui HaQadosh Baroukh Hou a accordé le mérite de saisir les secrets de notre sainte Torah, ceux qui ont répandu sur nous la bénédiction, les saints et sublimes Sages du Talmud, comme Rabbi Shim'on Bar Yoḥaï, ses collègues et ses disciples (18) ; Ceux qui qui ont bu à leur source dans les dernières générations, comme le merveilleux et saint homme de D.ieu, le Arizal (19), qui a illuminé nos yeux avec une petite partie des raisons et des intentions des Mitsvot, [toute cette révélation] a seulement été faite pour permettre pour permettre à chaque personne d'appréhender, selon [les capacités] de son intellect et de sa perception, la grande portée des détails de ses actes, de ses paroles, de ses pensées, et de toutes ses affaires sur les mondes supérieurs et inférieurs. [Une telle révélation] le touche et le motive pour observer et garder toutes les Mitsvot. Tout son Service divin s'effectuera dès lors avec grande précision, avec grande crainte et tremblement, avec amour, et toute la Sainteté et la pureté de son cœur.
C'est ce qui sera cause de plus grandes réparations dans les mondes que celles qui auraient eu lieu s'il avait accompli la Mitsva sans la Sainteté ni la pureté de l'intention.
Cependant, les éléments constitutifs essentiels de la Mitsva, sans lesquels elle est invalidée, ce sont les détails de son accomplissement matériel (20).
1 Devarim – Deutéronome 30,12 : « לֹא בַשָּׁמַיִם, הִוא ». C'est la formule qui met fin à la controverse entre Rabbi Éliézer et les Ḥakhamim dans Baba Metsia 59b. Alors qu'une voix céleste se manifeste pour donner raison à Rabbi Éliézer, les Sages répondent : « La Torah n'est pas dans le Ciel », mais bien confiée aux hommes pour qu'ils en révèlent le sens (voir plus loin dans ce chapitre).
2 Il est possible de voir ici un des rares arguments de Rabbi Ḥayim contre les Ḥassidim, à qui il pouvait arriver de prolonger leurs méditations personnelles, et de laisser ainsi passer l'heure de la prière de Minḥa.
3 Devarim – Deutéronome 34,10 : « וְלֹא-קָם נָבִיא עוֹד בְּיִשְׂרָאֵל, כְּמֹשֶׁה »
4 Wayiqra – Lévitique 27,34 : « אֵלֶּה הַמִּצְוֹת, אֲשֶׁר צִוָּה ה׳ אֶת-מֹשֶׁה-אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל: בְּהַר סִינָי »
5 Devarim – Deutéronome 13,1 et suivants : « אֵת כָּל-הַדָּבָר, אֲשֶׁר אָנֹכִי מְצַוֶּה אֶתְכֶם-אֹתוֹ תִשְׁמְרוּ, לַעֲשׂוֹת: לֹא-תֹסֵף עָלָיו, וְלֹא תִגְרַע מִמֶּנּוּ »
6 Shabbat 104a.
7 Berakhot 10a. Le roi Ḥizqiyahou était un très grand Tsaddiq. On dit de lui qu'il aurait pu être le Mashiaḥ, et il était doué d'une grande puissance prophétique. C'est ainsi qu'il vit qu'il y aurait des réshaïm (des impies) dans sa descendance, et cette vision le conduisit à renoncer à se marier. De fait, son fils le roi Ménashé, pratiqua l'idolâtrie à grande échelle pendant des années avant de faire Téshouva. Le Prophète Yéshayahou (Isaïe) rappela au roi que son devoir était d'accomplir la Mitsva de procréer, quelles que fussent la profondeur et la justesse de son intelligence de la Torah et de ses visions prophétiques.
8 II Mélakhim – II Rois 20,1 : « וַיֹּאמֶר אֵלָיו כֹּה-אָמַר ה׳ צַו לְבֵיתֶךָ-כִּי מֵת אַתָּה, וְלֹא תִחְיֶה. » La Guémara ci-dessus interprète ainsi la répétition : « Tu mourras : dans ce monde-ci ; tu ne vivras pas : dans le Monde à venir. »
9 Berakhot 34b. La Guémara fait cette réponse à la question : quel est le sens du verset « jamais œil humain n'avait vu... (עַיִן לֹא-רָאָתָה) » Voir en 4,21.
10 Ḥaguiga 12a.
11 Berakhot 10a.
12 Yévamot 90b : À une époque où il était interdit d'offrir des sacrifices en dehors du Beth haMiqdash (I Rois 18,25-41).
13 Mishléi – Proverbes 22,20 : « הֲלֹא כָתַבְתִּי לְךָ, שָׁלִשִׁים » que le Rabbinat traduit très différemment.
14 Cette requête ainsi que la réponse sont consignées en Méguila 7a. Ester avait demandé à ce que la Méguila fût incluse dans le Tanakh, et la fête de Pourim inscrite de manière permanente dans le calendrier juif. En réponse, les Sages ont cité le verset des Proverbes : « Ne t'ai-je pas écrit trois fois ? » qui est une référence par le roi Shelomo au fait que la guerre contre Amaleq ne devait être mentionnée que trois fois dans le Tanakh. L'inclusion de la Méguila, comme le demandait la reine Ester, constituerait une quatrième mention, qui n'aurait pas dû être permise si les Sages n'avaient pas trouvé une autre manière de relier sa requête à une source dans la Torah.
15 Ramban sur Bamidbar 8,2 cite la Méguilat Séfarim de Rabbi Nissim Gaon, qui relie les détails de l'allumage de la Ménorah dans le Mishkan à l'inauguration (Ḥanoukah) de l'autel.
16 Baba Métsia 59b (voir note 1.)
17 Shabbat 13b.
18 « La bénédiction » évoquée ici est le Zohar haQadosh, attribué à Rabbi Shim'on Bar Yoḥaï.
19 La bénédiction du Arizal (Rabbi Yitsḥaq Louria 1534-1572), c'est l'immense développement des enseignements de la Kabbala consignés par ses disciples, notamment Rabbi Ḥayim Vital, souvent cité.
20 C'est l'idée profonde de ce chapitre : l'absence d'une intention appropriée n'invalide pas l'accomplissement de la Mitsva, même si une telle intention est susceptible de produire des effets plus puissants dans la Création.